La centrale à charbon de Sendou* paralysée depuis Juillet 2019

Un litige opposant les actionnaires britanique (Quantum Pacific) et suédoises (Nykomb Synergetics Development AB) de la centrale à charbon de Sendou de 250Mw, bloque l’activité de cette dernière depuis juillet 2019.

Les deux co-actionnaires de la centrale à charbon de Sendou, située à 35 km au sud de Dakar, sont en conflit depuis les accusations de Quantum Pacific sur des faits présumés de détournements de fonds lors de la construction du site.

Un arbitrage est en cours à Londres entre les deux actionnaires réunis dans le consortium Compagnie d’électricité du Sénégal (CES).

Pour rappel :

Nykomb Synergetics appartient à Louis Claude Norland Suzor, un homme d’affaires résidant en Suède, qui a longtemps été associé aux sociétés du conglomérat indien Modi Enterprises. Sa société, qui s’est offert les services de l’agence de communication sénégalaise Carré rouge Afrique, est défendue dans ce dossier par l’avocate inscrite au barreau du Luxembourg Hiba Sabbagh.

Quantum Pacific, une société détenue par le milliardaire israélien Idan Ofer partage le capital social de la centrale avec Nykomb Synergetics. Quantum Pacific est devenue en novembre 2014 l’actionnaire majoritaire de la centrale (50% + 1 vote) après avoir racheté l’intégralité des parts du marocain Advisory Finance Group (AFG).

centrale de Sendou

Le conflit entre les deux actionnaires qui a commencé au début de l’année 2019, quelques mois à peine après la mise en service de la centrale, en octobre 2018. Quantum Pacific aurait alors pris conscience d’une série de malfaçons, de certains défauts de design industriel, notamment au niveau de la turbine qui ne pouvait fonctionner à sa capacité maximale de 125 MW.

La société britannique a alors mandaté des experts pour inspecter la centrale, avant de conduire des audits financiers qui auraient révélé une série d’irrégularités. Ce conflit entre actionnaires à de lourdes conséquences sur la centrale et son activité. Celle-ci est à l’arrêt depuis le mois de juillet à la suite d’un problème technique qui n’a pu être surmonté faute de pièces de rechange.

Le prestataire en charge de son exploitation, la joint-venture des françaises SPIE et EDF, impayé depuis plusieurs mois a finalement choisi en septembre 2019 de se retirer de la centrale de Sendou en licenciant de ce fait une soixantaine de salariés. La plupart des sous-traitants présents sur le site ont également choisi de le quitter. Ce départ s’explique par le refus de la Senelec (Société nationale d’électricité du Sénégal), qui achète l’électricité produite par la centrale, d’honorer ses paiements à la Compagnie d’électricité du Sénégal, en raison de la querelle entre ses deux actionnaires. Celle-ci ne peut en retour rémunérer ses prestataires.

Une tentative de médiation, qui a réuni début juillet la joint-venture française, la Senelec et la CES, s’est finalement soldée par un échec. Lors des discussions, Papa Toby Gaye, le directeur des grands projets de production de la Senelec, a fait part à ses interlocuteurs de son souhait de recourir à des solutions de secours. La société publique a finalement signé un mois plus tard un contrat avec l’entreprise turque Karpowership, qui a fait acheminer à Dakar l’un de ses bateaux-centrales d’une puissance de 235 MW.

La turbine de la centrale de Sendou, qui connaît plusieurs problèmes techniques, va être expédiée en novembre chez son fabricant indien pour des réparations dans le cadre d’une procédure de garantie. La turbine de de la centrale ne devrait pas être fonctionnelle avant juin 2020.

La construction de la centrale, qui a coûté 183 millions de dollars, avait été cofinancée par la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), la CBAO (une filiale de la banque Attijariwafa du Maroc), la banque de développement des Pays-Bas FMO et la Banque africaine de développement (BAD). Cette dernière avait notamment apporté 55 millions $ de prêts en 2009 à Nykomb Synergetics. Un an plus tôt, la société de Louis Claude Norland Suzor avait signé une convention d’achat d’électricité avec la Senelec d’un montant de 285 millions $. Interrogé par Africa Intelligence, Nykomb a refusé de se prononcer sur le conflit qui l’oppose à Quantum en arguant de la confidentialité des procédures d’arbitrage.

La société a cependant tenu à minimiser les problèmes techniques rencontrés par la centrale : « Aucun litige entre les actionnaires ne peut représenter un impact sur l’avenir de la centrale et sur son exploitation, déjà effective. Durant l’exploitation de la centrale et à l’instar de nombreux projets industriels, des améliorations techniques sont souvent nécessaires. Ces améliorations peuvent nécessiter l’arrêt temporaire des machines, ce qui ne constitue pas un frein à l’exploitation de la centrale. »

Source de l’article : Africa Intelligence.

*Centrale électrique alimentée au charbon de 125 MW sur un site de 29 hectares situé à 35 km de Dakar à Sendou (Bargny).

Centrale de Sendou

L’objectif avec cette centrale étant de contribuer à résoudre la crise dans le secteur de l’électricité en permettant de remplacer la production de générateurs d’urgence en location et de centrales âgées, ainsi qu’en permettant un meilleur entretien des autres centrales du parc de production.

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