Pourquoi Makhtar Cissé ne nous dit pas la vérité ?

Lors de cet atelier, nous avons constaté que la Senelec, à travers son site internet citer les sociétés Akilee SA, Excellec SA, Proquelec et Simelec comme ses filiales.

C’est ainsi que nous avons cherché à savoir ce qui lient réellement ces entreprises à la Senelec et ce qu’elles lui apportent de concret.

Nous avons pris le parti de partager avec vous dans une série d’articles (dont la première est celle-ci) les informations que nous avons recueillies et de permettre à chacun de se faire sa propre opinion sur l’opacité qui règne dans le secteur de l’énergie au Sénégal.

De toute évidence ce premier article, consacré à la société Akilee SA, est l’occasion de démêler le vrai du faux sur l’affaire du contrat de 187 milliards passé entre la Senelec et Akilee.

Du site internet de la Senelec, on apprend que Akilee, dont le nom est tiré du mot Swahili « akili », qui signifie intelligence et du mot Pulaar « hakkille » qui signifie également esprit, intelligence, est une solution technologique développée par des Sénégalais.

Dans son rapport de 2017, la Senelec nous apprend que sa filiale :

« Akilee SA est une nouvelle société technologique qui combine des services énergétiques et des services informatiques, dans le but de mettre sur le marché une solution destinée à aider les ménages et les entreprises à maitriser leur consommation d’énergie. La Senelec détient 34% du capital. »

Akilee SA a été officiellement lancée le 23 Août 2017 par le Directeur de Cabinet du Ministre de l’Energie, en présence du Directeur Général de Senelec Mouhamadou Makhtar CISSE.

En complément, sur le site internet de Akilee, on apprend que la société a été « créée à partir des solutions et innovations développées pendant trois ans (de 2014 à 2016) par la société i-NES, créée en 2013, acteur de référence dans le domaine de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables.

Akilee est donc une Société Anonyme, de droit sénégalais, avec un capital de 882.400.000 FCFA, détenu à 34% par Senelec et 66% par les promoteurs initiaux, tous sénégalais. »

Débarrassons-nous de cette première ambiguïté :

Non, répond Fatou Badji (juriste et présidente du pôle juridique de Article25).

En effet, « en droit commercial une société filiale est une entreprise dont 50% du capital a été formé par des apports réalisés par une autre société dite société mère qui en assure généralement la direction, l’administration et le contrôle par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs personnes, administrateurs ou gérants qu’elle a désignés.

Lorsque le capital d’une société est composé d’apports dont la valeur est supérieure à 10% mais inférieure à 50%, on se trouve en présence d’une simple participation ».

Donc d’un point de vue technique et comptable, Akilee est plutôt la filiale de la société i-NES et non de la Senelec.

Dés lors, vous vous demandez qui est cette dame i-NES qui donna naissance à Akilee ?

i-NES est créee en février 2013 à Dakar avec un capital de 1 000 000 FCFA dont le même Amadou Ly était le gérant.

À l’image de sa fille Akilee, i-NES est aussi une société de services énergétiques.

Une fois la traçabilité établie et que désormais on connaît les origines de la société Akilee, penchons-nous sur son rôle exact auprès de la Senelec ?.

A cette question la réponse d’Amadou Ly est la suivante :

« Akilee a développé la première plateforme de supervision du réseau de distribution de Senelec, qui permet de :

• Superviser en temps réel le rendement du réseau de distribution et de localiser les zones de pertes.
• Suivre en continue le niveau de charge des transformateurs et de mettre des outils d’aide à la décision innovants à la disposition des équipes du réseau.
• Etablir de manière fiable et transparente les statistiques du réseau.
• Suivre en temps réel la qualité de la distribution dans le réseau »

Il ajoutera même qu’Akilee a vocation à aider les sénégalais, à maîtriser les consommations d’énergie avec pour finalité d’arriver à réduire leur facture d’électricité si possible.

Nous en doutons pour deux raisons :

• Après 3 ans de mise en œuvre des solutions intelligentes d’Akilee, malgré cela  on assiste à l’augmentation du prix de l’électricité !
• Les promesses de 2017 de Amadou Ly et Makhtar Cissé sur la baisse du prix de l’électricité sont remises aux oubliettes avec de nouvelles hausses démesurées en 2019.

Que cachent ces discours contradictoires. Quoi qu’il en soit, ils ont encore menti.

Revenons à l’activité d’Akilee, aujourd’hui en plus de mettre en place un système d’informations permettant la supervision de l’ensemble du réseau de transport et distribution électrique,

elle fournira en outre à la Senelec 2 742 600 compteurs intelligents pour un montant global de 187 milliards pour les 10 prochaines années.

Le système de comptage est assez répandu en Europe. Depuis 2010 les pays de l’union européenne déploient ces types de compteurs sur l’ensemble de leur territoire. Ces compteurs sont capables de suivre en détail, et souvent en temps réel, la consommation électrique d’un bâtiment, d’une entreprise ou d’un foyer.

A la différence des compteurs électromécaniques, Ces compteurs dits « intelligents » sont en outre communicants et transmettent par différents canaux (courant porteur, Internet, téléphone) les informations recueillies.

En suivant les explications de Souleymane Gueye (Ingénieur Télécom et Secrétaire adjoint), nous avons pu comprendre que dans le système d’information, la collecte se fait à deux niveaux :

1. des compteurs aux concentrateurs 
2.  des concentrateurs à la plateforme.

Pour acheminer les données des compteurs aux concentrateurs, la technologie CPL (courant porteur en Ligne) est utilisée.

Elle consiste à utiliser le câble électrique comme support de communication.

En général, les concentrateurs se trouvent au niveau des poste de transformation.

Un second niveau de transmission après celui de la collecte consiste au réseau de transport. Il regroupe les données des concentrateurs et les transmets vers la Plateforme. Cette transmission pouvant se faire aux moyens de la fibre optique, GSM, GPRS, Ethernet…

Donc comme l’a dit Amadou LY, leur objectif est de superviser l’ensemble du réseau de la Senelec de la production aux compteurs (appareils terminaux des clients). En quoi cela consiste-t’il comme innovation ? À la Senelec peut-être. Notre frère Yaya Ly, Ingénieur polytechnicien nous rappelle que Akilee n’est pas la première société ayant mis en place la supervision et le comptage intelligent. Un certain nombre d’entreprises le font pour les clients particuliers ou professionnels. Et ajoute que lui-même a mis en place un nombre important de système de comptage et de supervision aussi bien dans le domaine hydraulique qu’électrique.

Sans doute, ces explications démontrent les errements de notre « Manager de l’année 2017 » Makhtar Cissé car Akilee, la fille d’i-NES manie seulement les octets et autres kilowattheures et n’a pas pour objet la fabrication et la vente des dits compteurs électriques intelligents.

Alors où est le scandale ?

• Le premier scandale se trouve dans la création et la mise en place d’Akilee, en réalité Akilee et i-Nes ne font qu’une seule entreprise.

La seule différence est que la Senelec est actionnaire de la première et non de la seconde.

La Senelec ayant 34% des actions d’Akilee (300 millions du Capital) et

i-NES 66% des actions (584 millions du Capital) .

Comment comprendre que la société I-NES avec un capital de 1 million (entre 2013 et 2017), puisse créer une autre société dans laquelle la valeur de sa participation dans le capital est de de 582,4 millions ?

Au final le seul but de ce stratagème est de contourner le code des marchés publics.

• Pourquoi sans appel d’offres la Senelec décide que toute l’opération de l’ensemble du réseau de distribution soit confiée à Akilee alors qu’en réalité la seule compétence qu’on peut lui reconnaître c’est la création du système d’information.
• N’étant ni fabricant ni concepteur de compteurs intelligents pourquoi Akilee doit-elle s’adjuger à elle toute seule les compteurs électriques dans les 10 prochaines ?

La seule réponse à ces questions légitimes, à notre sens, est que ce système mis en place consiste à légaliser des projets d’auto enrichissement.

Aboubakr Bengelloun Président Article 25    

Kémo Cissé Président de la commission Massification Article 25